Drosophila suzukii

Originaire d’Asie du Sud-Est, Drosophila suzukii a été détectée pour la première fois en France en juin 2010 (Corse, Var et Alpes-Maritimes). De par ses capacités de reproduction - 300 oeufs par femelles et jusqu' à 13 générations par an, et en profitant du transport des fruits qu' elle a infestés, elle est en train de s' étendre rapidement dans toute la France. Elle a été détectée en septembre 2013 en Alsace dans un tunnel de fraises remontantes. Des adultes mâles ont clairement été identifiés dans des pièges Biobest© spécifiques. En 2014, des spécimens ont été identifiés à Eschau et Fegersheim ou les ravages sont énormes sur cerises, framboises et mûres.

Surveillez vos fruits !


I. Description

L’adulte de Drosophila suzukii mesure de 2,6mm à 3,4mm, avec des yeux rouges et un corps brun-jaunâtre. Les larves sont petites et de couleur blanc-crème. La pupe de forme cylindrique est brun-rougeâtre, de 2-3 mm de longueur. Les œufs, pondus à l'intérieur du fruit, mesurent de 0,18mm à 0,6mm. Ils sont légèrement transparents, laiteux et luisants. Les mâles sont identifiables grâce à des taches sombres au bout des ailes, visibles à l’œil nu. Pour les femelles et les larves de D. suzukii, une analyse en laboratoire est nécessaire.


                        D. Suzukii mâle                                                  D. Suzukii femelle

Suzukii maleSuzukii femelle

Sa température optimale de croissance est 20°C, mais elle tolère des températures allant de 0°C à 30°C. Son cycle biologique est court (environ 7 jours), et lui permet d’avoir jusqu’à 13 générations par an. Le cycle débute au printemps quand des fruits sont disponibles pour les premières pontes .


II. Plantes hôtes

D. suzukii attaque surtout les fruits rouges (cerise, fraise, framboise, groseille …) et les tomates, mais aussi les arbres fruitiers (actinidia, figue, abricot, pêche, prune …) et les plantes sauvages. Les fraises précoces peuvent subir des dégâts en fin de culture. mais les fraises remontantes sont particulièrement concernées. D. suzukii peut pondre dans les baies ou fruits de certains arbustes (sureau, mûre, arbousier, cornouiller sanguin). La vigne est également touchée quand les raisins ont une couleur qui "plait" à D Suzukii (Par exemple, en Alsace : Pinot noir, pinot gris, ...).


III. Principaux symptômes sur fruits

Les dégâts peuvent être très importants. La femelle pond ses œufs dans les fruits, même ceux qui n’ont pas encore atteint leur stade de maturité (fruits rosés à rouges). La larve se développe dans les fruits et se nourrit de la pulpe intérieure du fruit. Ceci se visualise par un « affaissement » local de la chair et souvent par une dépression au niveau de l'épiderme. Les fruits deviennent mous et finissent par se vider totalement de leur contenu. Les dégâts peuvent aussi s’observer en frigo. Les attaques de D. Suzukii sur un fruit le fragilisent et facilitent l'insertion d'autres mouches, l'installation de champignons de type Rhizopus (fructifications noires sur les fruits), et la propagation d'autres maladies et ravageurs.

IV. Lutter contre D. suzukii

Actuellement aucun produit phytosanitaire n’est homologué dans la lutte contre Drosophila suzukii sur les fraisiers et autres plants. Les essais réalisés dans le cadre du Groupe de travail national mouche des fruits montrent que le diméthoate est actuellement la substance active homologuée qui présente la meilleure efficacité contre D. suzukii (95 % lors de l'essai).
A noter qu' à court terme, la lutte chimique peut permettre de limiter les attaques de D. suzukii, mais les possibilités importantes de mutation de cet insecte risquent de favoriser les phénomènes de résistance.
En agriculture biologique, des essais sont en cours avec des substances autorisées. L’utilisation de filets « insect-proof » est prometteuse mais contraignante. Elle est à privilégiée pour les petites parcelles, les cultures faciles à protéger ou les produits à haute valeur ajoutée.

En conclusion, et en attendant les résultats des tests en cours, la lutte sera basée sur la prévention, la détection des insectes, et l' élimination des fruits atteints.

1. Prévention et prophylaxie

Des méthodes de prophylaxie doivent être mises en œuvre afin de détecter au plus tôt le ravageur et limiter sa propagation. Par exemple :
- Observer régulièrement les fruits, surtout ceux proches de la maturité, pour repérer d'éventuels symptômes et/ou dégâts.
- Veiller à la bonne aération des cultures
- Recourir à une taille des arbres adaptée et au maintien d'une herbe basse.
- En cours de cueillette, ne pas jeter les fruits abîmés, pourris et/ou véreux au sol.
- Avoir une fréquence de récolte régulière et rapprochée.
- Ne pas laisser les fruits en sur-maturité sur les arbres et plants.
- Surveiller les fruits même après récolte.


2. Détection des adultes de D. suzukii

On peut utiliser des pièges chimiques commercialisés (Drosotrap®, MacPhail®, Maxitrap®, Probodelt®). On peut également confectionner soi-même des pièges artisanaux à partir d'une bouteille ou d'un bidon en plastique. Pour cela, trois séries de trous de 4 mm de diamètre à percer sur la partie milieu de bouteille. On accroche ensuite le piège avec de la ficelle nouée au goulot. Piège drosophile Suzukii Ensuite, on ajoute un attractif dans le piège. Cet attractif est un mélange liquide constitué de 1/3 vinaigre de cidre, 1/3 vin rouge et 1/3 eau, avec quelques gouttes de savon liquide ou de liquide vaisselle.
Ces pièges sont utilisés pour la détection des premiers vols. Afin de maximiser les chances de capture, le piège doit être placé dans la frondaison ou au niveau des fruits dans un endroit ombragé. L'idéal est de poser 1 piège par unité de culture.
Si D. suzukii a déjà été détecté sur un plant en particulier ou dans la culture, le piège doit être installé près de celle-ci. Dans le cas contraire, il est préférable d'installer le piège en dehors (extérieur du tunnel, haie proche du verger …) afin de ne pas favoriser l'entrée de D. suzukii dans la culture ou dans le verger.
Le contenu du piège doit être vidé une fois par semaine dans un flacon référencé. Il faut alors remplacer la solution attractive. Il est préférable de conserver les larves et insectes capturés dans le liquide et de les placer au frais pour d'éventuelles observations. On rappelle que seule une analyse en laboratoire permet l'identification de femelles et de larves de D. suzukii.

Les pièges mentionnés peuvent permettre un piégeage massif avec une densité forte de pièges autour des cultures et dans les haies - la densité optimale est encore à l’étude. Ce piégeage massif est actuellement encore à l'étude et n'a pas été validé.


3. Élimination des déchets et fruits atteints

Lors de la récolte, l'idéal est de mettre les déchets dans des fûts ou des containers étanches. On les ferme hermétiquement pour éviter toute fuite de drosophile, puis on les place en plein soleil ou à haute température. Une température minimale de 40°C est requise pour détruire les adultes et les larves de D. suzukii. On n'ouvre le container qu'après 4 jours, pour s'assurer du bon déroulement des opérations d'élimination. On vide le contenu dans un trou relativement profond de préférence. Prévoir plusieurs containers pour assurer un roulement, à cause de l'attente lors des opérations.
Il faut éviter d’enterrer les fruits à faible profondeur et sans réaliser de stockage hermétique à haute température, car les larves survivent et peuvent émerger.
On peut également recourir à la pose d’un film plastique sur les fruits attaqués au sol, ce qui permet de détruire les larves par solarisation.


V. Vers le futur

A ce jour, aucune méthode de protection et/ou de contrôle n’apporte de résultats satisfaisants contre D. suzukii. Des pistes sont à l'étude et des essais sont en cours pour tester des méthodes de protection comme la pose de filets aux ouvrants des abris (maille environ 1 mm) et le piégeage massif.
Une étude, débutée en 2013, est destinée à mieux connaître le ravageur et évaluer les méthodes de protection ; Coordonnée par le Ctifl, elle est conduite par des organismes nationaux (Ctifl, INRA, CNRS) et 9 stations d’expérimentation dont l’Aprel, le GRAB et la Tapy.
De nombreux moyens alternatifs à la lutte chimique sont envisagés.
- Le piégeage massif de l’insecte pourra être envisagé si un piège aux caractéristiques adéquates est développé. Il devra être très attractif, facile d’utilisation et peu coûteux. Les pièges actuellement utilisés pour le suivi des vols de D. suzukii ne sont pas adaptés pour cette utilisation.
- Des travaux sont également en cours pour tester l’efficacité de parasitoïdes et d’auxiliaires prédateurs contre Drosophila suzukii, et devraient donner lieu à moyen terme à des essais en cultures sous serre.
- Les modes de communication utilisés par Drosophila suzukii, notamment la communication olfactive (phéromones) et acoustique (émission de vibrations) sont à l’étude, et pourrait permettre à terme le développement de méthodes de confusion.
- D’autres méthodes sont également envisagées, parmi lesquelles la stérilisation d’insectes, l’utilisation de virus, etc.